Discerner l’action bienfaisante de Dieu dans ma vie

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L’engagement va de pair avec un regard qui génère la joie

À l’instar du père de la parabole du fils prodigue, nous sommes appelés à changer notre regard et à reconnaître que la vie est toujours à l’œuvre, que rien n’est perdu, et que le beau, le bien et le vrai sont présents en ce monde. Dieu élève le monde par l’entremise de toute personne qui vit en communion avec son Esprit.

Cet article a été rédigé à partir de l’ouvrage « Le retour de l’enfant prodigue » (p. 137-148) de Henri Nouwen, Éditions Bellarmin, 1995, 177 p.

N.B. Veuillez vous référer à la parabole en fin d’article.

Le père organise une fête

Père et fils prodigueDans la parabole du fils prodigue, le père qui voit au loin son fils cadet est « saisi de compassion; il court se jeter à son cou et le couvre de baisers. » (Lc 15,20b)

Le père est tellement heureux d’avoir retrouvé son fils qu’il organise une fête pour célébrer son retour :

« Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller, mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds, allez chercher le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie; il était perdu, et il est retrouvé. » (Lc 15,22-24)

Le fils aîné pour sa part est tellement centré sur sa personne, qu’il est incapable d’entrer dans la joie de son père.

De plus, le fils aîné se croit victime d’une injustice. Il n’a pas réalisé que son père l’aime profondément depuis toujours.

Il est donc jaloux de la sollicitude de son père à l’égard de son frère revenu à la vie.

Quelle est la qualité de mon regard?

Le père de la parabole, figure du Dieu invisible, est ému de compassion en apercevant son fils qui revient de loin.

La joie du père est grande. Il désire fêter son fils qui est revenu à la vie.

Au-delà des ténèbres dans lesquels son fils s’est fourvoyé, le regard aimant du père lui donne de croire « en des lendemains qui chantent » pour son fils.

Et nous, quelle est la qualité de notre regard?

Si l’on réfléchit à ce qui se passe dans notre vie personnelle, dans la vie des autres ou encore sur la face de la terre, il peut être tentant d’être triste et découragé, car la perfection n’est certes pas de ce monde.

Seulement, à l’instar du père de la parabole, nous sommes appelés à changer notre regard et à reconnaître que la vie est toujours à l’œuvre, que rien n’est perdu, et que le beau, le bien et le vrai sont présents en ce monde.  

Dieu élève le monde par l’entremise de toute personne qui vit en communion avec son Esprit.

Puis-je entrer dans la joie du père?

Est-ce que j’irais à la fête du fils cadet qui a été retrouvé? Ou bien est-ce que j’aurais l’attitude du fils aîné qui refuse d’entrer dans la joie du père?

Cette question me touche, aussi étrange que cela puisse paraître, car il est possible que je vive une résistance à une vie joyeuse. (p. 142)

Les médias nous ont tellement habitués à faire des mauvaises nouvelles (guerres, violence, crimes, conflits, scandales, désordres de toutes sortes) notre pain quotidien, que nous avons développé un goût pour ce qui ne va pas dans le monde.

Cela peut se refléter dans nos conversations où l’on s’attend à ce que les sujets « négatifs » prennent « normalement » une bonne place dans la conversation.

Le problème avec cet attrait nourri et entretenu avec « ce qui ne va pas » est que nous devenons peu à peu incapables de nous réjouir des choses, petites ou grandes, qui sont bienfaisantes et positives, et qui font grandement partie de notre vie.

La vraie vie n’est pas faite de « sensations fortes », mais elle apporte paix et joie pour qui sait discerner l’action bienfaisante de Dieu dans sa vie et dans ce monde.

Il y a assez de lumière pour ceux qui désirent voir

La lumière luit dans les ténèbresComme l’affirme Blaise Pascal,

Il y a assez de lumière pour ceux qui ne désirent que de voir, et assez d’obscurité pour ceux qui ont une disposition contraire.

Certes, il ne s’agit pas de vivre un optimisme béat et naïf.

Nous ne vivons certes pas dans un monde parfait : maints problèmes demandent à être résolus et plusieurs défis sont à surmonter.

Il nous appartient d’apporter notre inestimable contribution afin de changer ce monde et de le rendre meilleur. Le Seigneur compte sur nous et il a besoin de nous.

Seulement, même si le mal existe, ce qui est l’évidence même, le chrétien croit qu’il n’aura pas le dernier mot :

« Prenez courage! J’ai vaincu le monde. » (Jn 16,33b)

Le Christ a vaincu le monde. Le chrétien se bat pour un combat déjà gagné. Il ne doit donc pas se laisser impressionner ou décourager par le mal.

Il sait que petit à petit, l’humanité s’achemine vers la civilisation de l’amour.

Le Royaume de Dieu est déjà à l’œuvre en ce monde et il viendra en plénitude.

Cynisme ou foi?

Selon le dictionnaire Wikipédia, « au sens contemporain, le cynisme est une attitude ou un état d’esprit caractérisés par une faible confiance dans les motifs ou les justifications d’autrui, ou un manque de foi ou d’espoir dans l’humanité ».

Le père de la parabole du fils prodigue est tout sauf cynique.

Le cynisme est de fait à l’extrême opposé de l’attitude d’esprit qui favorise la joie.

Les cyniques … (p. 145-146) :

  • … recherchent les ténèbres partout où ils vont.
  • … signalent sans cesse les dangers qui approchent, les motifs impurs ou les plans cachés.
  • … traitent la confiance de « naïveté ».
  • … qualifient l’attention à l’autre de « romantisme ».
  • … considèrent que le pardon accordé est « sentimentalité ».
  • … se moquent de l’enthousiasme.
  • … ridiculisent la ferveur spirituelle.
  • … méprisent le comportement charismatique.

En choisissant de ne voir que l’obscurité, le cynique éteint la joie et il fait naître encore plus de ténèbres.

Les personnes qui ont expérimenté la joie de Dieu ne nient pas les ténèbres, mais elles choisissent de ne pas y demeurer. (p. 146)

Nous pouvons décider ne pas centrer indûment notre attention sur ce qui est négatif, ce qui mine inutilement l’énergie et cause de l’anxiété.

L’engagement pour rendre ce monde meilleur va de pair avec un regard qui génère la joie, car il sait discerner la « lumière qui brille dans les ténèbres » (Jn 1,5).

Savoir discerner la présence cachée de Dieu

Savoir choisir la lumière, discerner la présence cachée en ce monde et en nous, cela demande une véritable discipline. (p. 144)

Plutôt que de vivre dans l’imaginaire, dans le passé ou dans le futur, il importe de vivre et de goûter l’instant présent. Être sensible à ce qui m’entoure, ici et maintenant.

Chaque minute, nous avons l’occasion de choisir, par pensée, parole ou action, entre le cynisme et la joie.

Le Dieu de la joie est à l’œuvre dans les personnes …

  • … qui guérissent leurs blessures réciproques
  • … qui se pardonnent mutuellement
  • … qui partagent leur avoir
  • … qui favorisent l’esprit communautaire
  • … qui célèbrent les dons reçus

Comme le fils cadet revenu à la maison du Père, la joie de Dieu m’est offerte.

Alors que je peux être tenté par la tristesse, la mélancolie, le cynisme, les humeurs noires, les pensées sombres, les spéculations morbides et les vagues de dépression, cela demande une véritable discipline pour être attentif à la vie qui se manifeste en moi, dans les autres et en ce monde.

Prendre le temps de relire ma journée

Il importe de m’exercer à l’écoute des touches de l’Esprit dans ma vie, car mon histoire est sacrée.

L’histoire de l’Alliance telle relatée dans la Bible s’applique également à moi, au-delà de mes fidélités et de mes infidélités.

À l’instar du Père de la parabole, l’amour de Dieu ne me lâchera jamais. Sa fidélité est inébranlable, son amour plus solide que le roc.

ÉcritureRelire ma journée par le biais de l’écriture est un véritable enfantement à moi-même.

Écrire mon journal spirituel est un incontournable afin de devenir sensible à l’action de Dieu dans ma vie.

Dieu m’a parlé aujourd’hui par mon vécu, par des personnes et par des événements, et peut-être que je ne m’en suis même pas rendu compte.

La relecture de ma journée est comme un temps de récolte où j’apprends à discerner l’action bienfaisante de Dieu dans ma vie.

Je découvrirai peut-être …

  • … un regard qui m’a fait vivre
  • … une parole qui m’a dynamisé
  • … une personne qui a cru en moi
  • … les bienfaits de telle décision

Autant d’événements et de signes de la Présence discrète et vivifiante de Dieu dans ma vie.

Ma vie est beaucoup plus habitée par la Présence de Dieu que je pourrais le croire de prime abord.

Relire ma vie, c’est découvrir la lumière et la vie au-delà de la présence du mal en ce monde. C’est choisir de faire la vérité. C’est reconnaître la joie dans les petites choses de ma vie.

Benoît XVI avait dit que nous avons besoin de nous rééduquer à l’émerveillement. C’est une grâce à demander.

L’émerveillement nous délivre de la grisaille et de la monotonie, car elle nous fait découvrir la Présence de Quelqu’un qui est à l’œuvre dans notre vie.

S’entretenir avec le Seigneur sur ce qui a fait la trame de ma journée

Seigneur, aide-moi à discerner les signes de ta Présence dans le plus « ordinaire » de mon quotidien.
Ouvre mon cœur à la paix et à la joie.
Donne-moi d’entendre ta Parole.
Donne-moi la limpidité de ton Regard.
Donne-moi d’apprendre les mots qui édifient et les gestes qui construisent.

Il s’agit de faire la « récolte » de ma journée, bref, de noter les « prises de conscience » et les « fruits » de ma journée.

Tout d’abord, remercier le Seigneur pour ma journée.

Un peu comme un film que l’on visionne ou revisionne, passer en revue ma journée.

Devenir attentif aux « petits » faits de ma journée : un coup de fil inattendu, un coucher de soleil, le sourire d’une personne, telle rencontre, la beauté d’un visage, une parole réconfortante et vivifiante, une écoute attentive, un silence inspirant, le sentiment d’un travail bien fait, une lecture édifiante, un temps de prière fécond, un temps de solitude « plein » …

Me questionner :

  • Qu’est-ce qui m’a apporté la paix ou la joie aujourd’hui?
  • Où est-ce que j’ai discerné les délicatesses de Dieu?
  • Aurais-je ressenti de la tristesse dans la journée?
    Puis-je discerner la raison de cet état? Faire un effort de vérité.
    Prier le Seigneur afin de comprendre la cause de cet état.
    Peut-être déciderais-je de parler de cet état ou souci à quelqu’un.
  • Qu’est-ce que j’ai appris aujourd’hui sur mes rêves, sur ce qui m’anime et me dynamise?
  • Est-ce que la revue de ma journée m’a révélé quelque chose que je dois changer afin d’être plus ajusté avec mon cœur profond?
  • Est-ce que j’ai réalisé que je vis des peurs qui font obstacle à la réalisation de mes rêves?
    Confier mes peurs comme mes rêves au Seigneur. Lui demander consolation, paix, force et courage.

Il est possible que le fait de revisiter ma journée me fasse reconnecter avec des événements passés de mon existence que je regrette.

Il est important de confier ma vie passée à la miséricorde de Dieu et ne pas miner mes énergies à regretter un passé que je ne peux refaire de toute manière.

« Car si notre cœur nous accuse, Dieu est plus grand que notre cœur, et il connaît toutes choses. » (1 Jn 3,20)

Comme le disait, le refrain d’un chant : « Tout recommence en Jésus-Christ, prenons la route, qui nous mène à lui ».

« Vous êtes tous au début de votre vie, moi le premier », disait le Père Henri Boulad.

Il est toujours possible de tout recommencer, avec l’aide de Dieu, fort heureusement.

Finalement, est-ce qu’il y a des décisions que je désire prendre suite à ma relecture pour plus de vie, d’amour et de vérité? Prendre en compte mes besoins et ceux des autres.

Demander au Seigneur son aide pour les changements que je désire apporter dans ma vie et pour les projets que je veux créer suite à mes prises de conscience.

Conclure ce temps de relecture en remerciant le Seigneur pour l’amour et la lumière qu’il m’apporte.

Parabole du fils prodigue (Lc 15,11-32)

Jésus dit encore :

« Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : “Père, donne-moi la part de fortune qui me revient.” Et le père leur partagea ses biens.

Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait, et partit pour un pays lointain où il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre.

Il avait tout dépensé, quand une grande famine survint dans ce pays, et il commença à se trouver dans le besoin.

Il alla s’engager auprès d’un habitant de ce pays, qui l’envoya dans ses champs garder les porcs.

Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien.

Alors il rentra en lui-même et se dit : “Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim! Je me lèverai, j’irai vers mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Traite-moi comme l’un de tes ouvriers.”

Il se leva et s’en alla vers son père. Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de compassion; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers.

Le fils lui dit : “Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.”

Mais le père dit à ses serviteurs : “Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller, mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds, allez chercher le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie; il était perdu, et il est retrouvé.” Et ils commencèrent à festoyer.

Or le fils aîné était aux champs. Quand il revint et fut près de la maison, il entendit la musique et les danses. Appelant un des serviteurs, il s’informa de ce qui se passait.

Celui-ci répondit : “Ton frère est arrivé, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il a retrouvé ton frère en bonne santé.”

Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d’entrer. Son père sortit le supplier.

Mais il répliqua à son père : “Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. Mais, quand ton fils que voilà est revenu après avoir dévoré ton bien avec des prostituées, tu as fait tuer pour lui le veau gras!”

Le père répondit : “Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi.
Il fallait festoyer et se réjouir; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie; il était perdu, et il est retrouvé !” »

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