Foi et charité se donnent la main

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Au-delà d’une conception purement intellectuelle de la foi

Pour l’apôtre Paul, foi et charité se donnent la main. L’apôtre nous rappelle que la vie chrétienne, bien que source de grande joie, n’est pas chose facile car tel n’est pas l’apprentissage d’une vie donnée.

Cet article a été rédigé à partir de l’ouvrage « Le secret de Saint-Paul » (p. 116-133) de José Prado Flores, Éditions des Béatitudes, 1999, 201 p.

L’essence de la foi chrétienne selon saint Paul

Pour l’apôtre Paul, Dieu propose le don gratuit du salut, mais il appartient à l’être humain de le faire sien en toute liberté et de l’incarner par des gestes qui le rendent présent et agissant. (p. 116)

Cœur et croixLa grâce de Dieu, don gratuit de vie, invite l’être humain à s’engager pleinement dans une vie de foi opérant par la charité :

Car, dans le Christ Jésus, ce qui a de la valeur, ce n’est pas que l’on soit circoncis ou non, mais c’est la foi, qui agit par la charité. (Ga 5,6)

Bref, avec saint Paul, nous sommes loin d’une conception purement intellectuelle de la foi où il suffirait d’adhérer à un corps de vérités révélées pour être sauvé. C’est beaucoup plus profond et engageant que cela.

Comme l’affirmait le théologien Bultmann à propos de la foi, « elle naît de l’écoute de la Parole et elle appelle à une manière de vivre. »

De fait, saint Paul rappellera à maintes reprises aux nouveaux chrétiens de se détourner de ce qui fait obstacle à l’action de Dieu dans leur vie.

La manière de vivre du chrétien se traduit par des œuvres qui manifestent le don de salut en Jésus-Christ. (p. 118)

De même, saint Jacques insistera sur le fait que vivre sous la motion de l’Esprit rend fécond :

Mes frères, si quelqu’un prétend avoir la foi, sans la mettre en œuvre, à quoi cela sert-il? Sa foi peut-elle le sauver?
Supposons qu’un frère ou une sœur n’ait pas de quoi s’habiller, ni de quoi manger tous les jours;
si l’un de vous leur dit : « Allez en paix! Mettez-vous au chaud, et mangez à votre faim! » sans leur donner le nécessaire pour vivre, à quoi cela sert-il?
Ainsi donc, la foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte.
En revanche, on va dire : « Toi, tu as la foi ; moi, j’ai les œuvres. Montre-moi donc ta foi sans les œuvres ; moi, c’est par mes œuvres que je te montrerai la foi.
(Jc 2,14-18)

Foi et charité se donnent la main.

Finalement, le chrétien qui vit de plus en plus en communion avec l’Esprit du Ressuscité pourra un jour affirmer : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. » (Ga 2,20)

L’apôtre Paul nous apprend que la vie de foi est exigeante

À la lumière de ce qui a été exprimé précédemment, nous entrevoyons que la vie de foi n’est pas chose facile.

Saint Augustin affirmait : « Dieu qui t’a créé sans toi ne te sauvera pas sans toi. »

Nous avons notre rôle à jouer dans notre « nouvelle naissance » (Jn 3,1-21), car l’Amour qui est Dieu lui-même ne s’impose pas.

Pour sa part, le prêtre et mystique Maurice Zundel n’hésitait pas à affirmer que « l’amour est, sans doute, ce qu’il y a de plus difficile. » (L’homme existe-t-il?, Éditions du Jubilé, 2004, p. 106)

Cependant, Zundel nous rappelait que c’est l’Amour en Personne qui suscite le nôtre, secret de notre naissance à une vie de charité :

La vraie vie commence avec le don qui engendre l’espace où l’amour respire. Celui qui aime un meilleur que soi, au plus intime de soi, devient le rayonnement du Bien infini avec lequel il s’identifie. (Pèlerin de l’espérance, Anne Sigier, 1997, p. 16)

L’expérience prouve que l’homme ne se délivre de soi que dans une explosion de générosité : quand il ne peut faire moins que de donner tout ce qu’il est. Mais pour cela, il faut qu’il se sente nécessaire à quelqu’un qui se livre tout entier à sa générosité.
(Pèlerin de l’espérance, Anne Sigier, 1997, p. 17)

Ainsi l’homme sera sauvé quand il ne voudra plus sauver, en soi, que la Présence infinie qui est le secret le plus personnel de chacun et le seul vrai bien commun de tous.
(Pèlerin de l’espérance, Anne Sigier, 1997, p. 18)

En écoutant Zundel, on croirait entendre saint Paul :

Ne le savez-vous pas? Votre corps est un sanctuaire de l’Esprit Saint. (1 Co 6,19)

Le mot « charité » du latin « caritas » est défini à merveille par l’expression anglaise « take care » (tas cari) qui se traduit en français par « prendre soin ».

La vie de charité est une vie où nous « prenons soin » de Quelqu’un qui est la Vie même et qui habite tout être humain.

Cette vie de foi opérant par la charité a un prix car il y a un combat permanent entre le « moi, moi, moi » qui ramène tout à soi et l’attrait vers l’Autre qui seul peut nous libérer.

Le théologien allemand Dietrich Bonhoeffer dans son ouvrage « Le prix de la grâce » (publié en 1937) n’hésitait pas à affirmer que « la grâce coûte ».

Il y a en effet un prix à payer pour être un véritable disciple du Christ :

Alors Jésus dit à ses disciples : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. (Mt 16,24)

Les preuves de mon apostolat ont éclaté au milieu de vous par une patience à toute épreuve… (2 Co 12,12)

Le signe distinctif d’un véritable disciple de Jésus Christ, à l’instar de l’apôtre Paul, est la capacité à s’investir et donc à « payer le prix » pour une véritable vie de foi.

Alpiniste - ObstaclesL’apôtre Paul était certes un véritable athlète de la foi, soulignons-le assez unique, lui qui afin de gagner le Christ et de le faire connaître, a su perdre du temps, de l’argent, sa santé, le prestige et toutes sortes de confort.

La vie héroïque de l’apôtre fut une véritable course à obstacles permanente.

Or peu importe notre vocation ou notre condition présente, saint Paul nous rappelle, à l’instar de Dietrich Bonhoeffer, que la grâce coûte et que la vie de foi opérant par la charité a un prix.

Paul a su poursuivre son apostolat malgré les inévitables problèmes qu’il a pu vivre : attaques personnelles, crises psychologiques, attaques physiques, échecs pastoraux, danger de mort, douleur, « écharde dans la chair », etc. (p. 130-131)

Seulement, Paul témoigna que joie et bonheur n’étaient pas incompatibles avec une vie exigeante :

Ne ralentissez pas votre élan, restez dans la ferveur de l’Esprit, servez le Seigneur, ayez la joie de l’espérance, tenez bon dans l’épreuve, soyez assidus à la prière. (Rm 12,11-12)

Sa mission, comme toute vocation, d’ailleurs avait un prix. Dès Damas Paul comprenait qu’il devrait porter un grand poids :

Mais le Seigneur lui dit : « Va! car cet homme est l’instrument que j’ai choisi pour faire parvenir mon nom auprès des nations, des rois et des fils d’Israël. Et moi, je lui montrerai tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon nom. » (Ac 9,15-16)

Cependant, le sens ultime de Paul à sa vie et le fort sentiment de l’importance de sa mission lui ont permis de donner un sens aux inévitables croix qui ont pu joncher sa vie, si bien que la joie de Paul fut profonde, malgré les difficultés.

Savoir qu’on est en train de payer le prix d’une très grande mission change totalement la donne (p. 132) :

Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers : héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si du moins nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire.
J’estime, en effet, qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire qui va être révélée pour nous. (Rm 8,17-18)

L’exclamation de Paul devant chaque difficulté était « Ciel en vue! » :

Car notre détresse du moment présent est légère par rapport au poids vraiment incomparable de gloire éternelle qu’elle produit pour nous. (2 Co 4,27)

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