La place de l’homme et de la femme dans les services d’Église

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Libre propos


11 juillet 2017


Alors que les prêtres se font de plus en plus rares, la question de la place de l’homme et de la femme dans l’Église – et particulièrement de la femme – se pose avec encore plus d’acuité. Si depuis les récents synodes le Pape François a ouvert le débat, à nous de prendre le relais.

Propos ou plaidoyer

J’ai coiffé mon article d’un : Libre propos… À bien y penser, l’intitulé plaidoyer serait peut-être plus approprié. La question de la place de l’homme et de la femme dans les services d’Église est plus que délicate. Elle soulève les passions. Notre Église est bien cléricale et masculine…

Qu’on soit en France, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Québec ou en Italie, même si les discours varient, force nous est de constater – pour reprendre les mots de Christine Pedotti et d’Anne Soupa – que l’eau du baptême semble ne pas avoir le même effet sur tous. Pourtant…

Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu le Christ. Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus ni homme ni femme; car tous vous êtes un en Jésus Christ.(Galates 3:27-28)

Clivages

Cathedral of the MadeleineUn regard même rapide sur la vie de l’Église nous apprend qu’elle entretient les clivages depuis fort longtemps. D’abord entre clercs et laïcs, puis entre hommes et femmes, ce dernier clivage étant encore plus pointu.

Le débat récurrent entourant l’accession des femmes au sacerdoce en témoigne. Malheureusement il occulte une question qui lui est antérieure à savoir la place même des femmes dans l’Église avec leurs compétences propres. Et pourtant il n’y a plus ni homme ni femme…

J’ai souvenance d’un évêque qui a posé cette question aux membres de son Conseil presbytéral : que peut-on confier aux laïcs? Un pavé a été jeté dans la marre quand on suggéra de reformuler ainsi la question : quels pouvoirs sommes-nous prêts à partager avec eux? Même le débat sur l’utilisation de l’adjectif pastoral, ne fait pas l’unanimité. S’agit-il d’une exclusivité sacerdotale ou si le travail d’hommes et de femme en Église peut être qualifié de pastoral?

Une place, mais quelle place?

Pour les femmes la place est trop souvent la dernière. La journaliste Lucetta Scaraffia le démontre à sa manière. Responsable du supplément féminin du journal L’Osservatore Romano publié par les services de presse du Vatican, elle fut l’une des rares femmes à participer au dernier synode sur la famille et à y prendre la parole. Elle était assise au dernier rang ce dont témoigne son livre Dall’ultimo banco (De la dernière banquette) publié en français chez Salvator sous le titre Du dernier rang – Les femmes et l’Église.

Voilà qui en dit long sur la place des femmes dans l’Église. Mais a contrario elle attire l’attention sur les efforts du Pape François pour casser le modèle d’une Église qui persiste dans son cléricalisme. Entrées sur la pointe des pieds, des femmes auront contraint les pères synodaux à entendre un autre discours.

Tout de même la côte est difficile à remonter. Le poids des siècles se fait sentir et le fera encore longtemps. En cherchant dans la foulée de Vatican II à tisser des liens étroits entre tous les baptisés, l’Église doit aussi gérer un modèle hérité des siècles.

Quelques ouvertures

Heureusement les sanctuaires se sont ouverts. Des laïcs hommes et femmes collaborent étroitement au culte en proclamant la Parole, en aidant au partage du pain eucharistique ou encore en assurant le service de l’autel.

Voilà qui témoigne que chacun et chacune par son baptême est une pierre vivante de l’édifice ecclésial, le vrai temple. C’est déjà un témoignage – un nécessaire témoignage – qui n’appauvrit en rien la fonction sacerdotale, bien au contraire.

Par ailleurs, le constat est facile, le partage de rôles et de fonctions particulièrement au plan liturgique prédomine. Un aspect de la place accordée aux hommes et aux femmes dans les services d’Église se donne ainsi à voir. Mais celle-ci dépasse l’espace cultuel ou celui de la catéchèse des enfants et de l’administration matérielle.

La voix des femmes

Lors du synode sur la famille, le Pape François a bousculé les habitudes en s’adressant directement aux personnes concernées par le débat, à savoir les couples et les familles. Le modèle familial traditionnel, la définition même du mariage s’ils sont encore pertinents pour les clercs, ne le sont plus pour beaucoup d’usagés.

Alors faut-il redire un discours qui n’est plus entendu ou proposer quelque chose d’autre? Qui pourra l’inspirer? Qui peut témoigner des défis de la vie chrétienne au quotidien sinon ces hommes, ces femmes, ces jeunes en quête de sens? Ici la voix des femmes – l’originalité de la voix des femmes – à côté d’un discours masculin trop connu est devenue nécessaire et urgente.

Des pas se font

On n’a pas encore toutes les réponses à la question de la place de l’homme et de la femme dans les services d’Église, pas plus d’ailleurs que dans la société laïque. Mais reconnaissons que des pas se font et surtout que le débat s’élargit. Le Pape François a le courage de questionner et de poser des gestes courageux.

La grâce baptismale

Grâce baptismaleÀ nous, dans chacun de nos milieux de prendre le relais. À nous de favoriser les prises de parole, celles qui entraînent droit devant et particulièrement celle qui dérange.

À nous surtout de se redire qu’hommes et femmes – et surtout les femmes – n’ont pas qu’une place dans l’Église et surtout pas la dernière.

Ensemble avec les consacrés et les clercs de tous ordres, hommes et femmes lui donnent son visage. Ils sont ses bras et ses mains. À nous de redécouvrir la grâce baptismale : Tous nous sommes un en Jésus Christ. C’est le secret du virage missionnaire tant espéré par le Pape François.

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