Humanisation ou divinisation? En Jésus ressuscité, homme intégral, la personne devient authentiquement humaine et reçoit en même temps la vie divine.
Introduction
« Vous serez comme des dieux » avait promis le serpent à Adam et Ève, selon le récit hautement symbolique du livre de la Genèse. N’y a-t-il pas là un vieux rêve remontant aux origines de l’humanité et qui se retrouve sous différentes formes dans la littérature?
C’est pourtant dans ce contexte que les évêques du Québec propose l’humanisation comme objectif des activités catéchétiques, ou mieux, de la « formation à la vie chrétienne » .
Le volume qui sortira bientôt et qui contiendra les orientations adoptées définitivement par les évêques portera le titre : Jésus Christ, chemin d’humanisation.
La théologie classique aurait parlé plutôt de « divinisation » et de participation à la vie divine. Par le mot « humanisation », en serait-on arrivé à concevoir le salut chrétien de façon horizontale, sans dépassement des horizons et des limites de notre bonne vieille humanité? Y aurait-il contradiction entre les mots « humanisation » et « divinisation » ?
Humanisation et divinisation
Dans la foi chrétienne, il n’y a aucune contradiction entre ces 2 termes, bien au contraire. D’ailleurs, les évêques du Québec, dans leur volume, parlent d’accueil du don de la vie divine, de participation à la vie trinitaire, etc. Mais ils mettent l’accent sur « l’accueil du don de la vie divine comme source et fondement de l’humanisation en Jésus Christ ». Et en cela, ils sont en parfaite ligne avec les écrits du Nouveau Testament et la grande tradition des Pères de l’Église.
En Jésus Christ est née l’Humanité nouvelle
Les lettres de saint Paul contiennent des passages merveilleux sur le thème de l’Humanité nouvelle. Par exemple, dans les épîtres aux Colossiens et aux Éphésiens, on trouve expressément l’idée que Dieu a créé une Humanité nouvelle (ou un Homme nouveau) dans l’événement de la mort-résurrection du Christ (Ep 2,151 et Col 3,12).
Jésus n’a pas perdu son humanité en traversant le mur de la mort pour déboucher, par sa résurrection, dans le Royaume de son Père, dans la plénitude de la divinité. Au contraire, il est devenu l’homme nouveau, l’homme intégral. À sa suite, nous sommes appelés à connaître la même transformation que lui.
Comme l’écrit saint Paul, « le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui se sont endormis » (1 Co 15,20), ou encore, « Il est le Principe, le Premier-Né d’entre les morts » (Col 1,18). C’est donc dire que Jésus, dans le mystère pascal, nous représentait tous.
À sa suite, nous sommes appelés à devenir Humanité nouvelle. Par la foi et le baptême, nous possédons déjà les germes de cette vie nouvelle qui connaîtra son épanouissement plénier dans le Royaume.
Un processus d’humanisation et de divinisation
Dans la vie de foi à la suite de Jésus s’accomplit un mystérieux échange de l’humain et du divin. En recevant le don de la vie divine en moi, je deviens plus humain, authentiquement humain, intégralement humain une fois entré dans le Royaume.
J’expérimente une nouvelle naissance (Jn 3,3-53); à mon tour, je nais du Père, comme Jésus. Je deviens « fils et donc héritier de Dieu » (Rm 8,17). Ce processus spirituel me met en quête de ma véritable humanité.
Mais la détresse et l’aliénation humaines sont si profondes que la libération ne peut venir du seul effort de l’être humain. Notre univers est actuellement en profond déficit d’humanité. Aujourd’hui comme toujours s’avère nécessaire l’apport du don de Dieu pour que se produise l’accomplissement humain, dans sa réalisation la plus plénière.
Comme l’écrivait à juste titre saint Irénée de Lyon (3e siècle) : « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant » . Dans cette perspective, l’Évangile est une Bonne Nouvelle qui ouvre un nouvel horizon de vie et d’humanisation. Et les évêques du Québec ont bien raison d’écrire que « la vie offerte en Jésus Christ ouvre un chemin d’humanisation bien particulier » . Et que « la divinisation dont il est ici question est indissociable d’une manière humaine d’être et d’agir ».
Le don de l’adoption filiale
Dans deux de ses lettres, saint Paul témoigne du fait que le mystère de la mort-résurrection de Jésus nous confère l’adoption filiale, de sorte que nous devenons vraiment des fils et filles du Père céleste (Ga 4,5-74 et Rm 8,14-175). L’image de l’adoption est ici très significative.
En effet, l’adoption est l’acte par lequel des parents donnent à un enfant en mal de vivre la grâce d’une vie nouvelle, en lui offrant de partager leur propre vie. Nous sommes et nous resterons des êtres humains, mais nous pouvons dès maintenant être « divinisés » en recevant en nous la vie divine.
Ce don vient d’un Dieu qui nous aime au point de nous offrir de partager sa propre vie. On sait d’expérience que l’amour est en lui-même un dynamisme de communication; non seulement communication des biens, mais plus encore celle des personnes. Parce qu’il est Amour, Dieu communique sa vie. C’est dans sa nature même.
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Ep 2,15
2:15 Il a aboli la loi et ses commandements avec leurs observances. Il a voulu ainsi, à partir du Juif et du païen, créer en lui un seul homme nouveau, en établissant la paix
TOB -
Col 3,1
3:1 Du moment que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu.
TOB -
Jn 3,3-5
3:3 Jésus lui répondit: “En vérité, en vérité, je te le dis: à moins de naître de nouveau, nul ne peut voir le Royaume de Dieu.”
3:4 Nicodème lui dit: ” Comment un homme pourrait-il naître s’il est vieux? Pourrait-il entrer une seconde fois dans le sein de sa mère et naître?”
3:5 Jésus lui répondit: “En vérité, en vérité, je te le dis: nul, s’il ne naît d’eau et d’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu.
TOB -
Ga 4,5-7
4:5 pour payer la libération de ceux qui sont assujettis à la loi, pour qu’il nous soit donné d’être fils adoptifs.
4:6 Fils, vous l’êtes bien: Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils, qui crie: Abba – Père!
4:7 Tu n’es donc plus esclave, mais fils; et, comme fils, tu es aussi héritier: c’est l’œuvre de Dieu.
TOB -
Rm 8,14-17
8:14 En effet, ceux-là sont fils de Dieu qui sont conduits par l’Esprit de Dieu:
8:15 vous n’avez pas reçu un esprit qui vous rende esclaves et vous ramène à la peur, mais un Esprit qui fait de vous des fils adoptifs et par lequel nous crions: Abba, Père.
8:16 Cet Esprit lui-même atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu.
8:17 Enfants, et donc héritiers: héritiers de Dieu, cohéritiers de Christ, puisque, ayant part à ses souffrances, nous aurons part aussi à sa gloire.
TOB