La Trinité est le premier dogme de l’Église, et pourtant le moins souvent évoqué. C’est là un grand paradoxe. Pourtant ce mystère est le plus grand et contient tous les autres.
Introduction
La Trinité est le premier dogme de l’Église, et pourtant le moins souvent évoqué. C’est là un grand paradoxe. Pourtant ce mystère est le plus grand et contient tous les autres.
Il est le plus riche, le plus fondamental et le plus significatif de tous les mystères chrétiens.
Malgré sa réputation d’être incompréhensible, il peut se résumer en une petite phrase citée par Jean : « Dieu est Amour ! ».
Un peu d’histoire
La Trinité divine, donc? Pour les plus de cinquante ans, ce mystère a été présenté comme le plus incompréhensible, le plus rébarbatif même de tous les dogmes de l’Église. Déjà au 5e siècle, saint Augustin aimait répéter qu’il est aussi difficile de comprendre ce mystère que de mettre l’océan complet dans un petit trou creusé dans le sable de la plage.
Quinze siècles plus tard, le Petit catéchisme du Québec appliquait la même définition restrictive à tous les mystères : « Un mystère est une vérité que nous ne pouvons pas comprendre, mais qu’il nous faut croire parce que c’est Dieu qui l’a révélé. »
Eh bien non! Ce grand mystère n’est ni incompréhensible ni imposé. Comme tout mystère évidemment, nous n’aurons jamais fini de l’approfondir et surtout de le faire passer dans notre vie. Comme tout mystère aussi, nous ne pourrons en tirer profit que si nous y adhérons de tout notre cœur.
Mais de là à y croire dans une incompréhension totale, sous prétexte que la révélation serait divine, il y a une marge qu’il nous faut tâcher de ne jamais franchir. Et puis, bien avant d’être une vérité, ce grand mystère est d’abord une expérience. Et une expérience intime qui se joue au plus profond de soi.
Ensuite, s’il était incompréhensible, il n’y aurait pas lieu d’y adhérer. Nous ne sommes pas des machines à la solde de Dieu, quand même. Non, nous sommes enfants de Dieu dans le Christ Jésus. Et le premier résultat de l’adoption divine en Jésus, c’est de nous rendre libres.
4 vérités fondamentales
Dans ce que j’aime appeler « la sainte liberté des enfants de Dieu », comment pouvons-nous aborder ce grand mystère sans trop le déformer? Commençons par nous donner une disponibilité de cœur d’abord, d’esprit ensuite. De cœur pour entrer dans une expérience intime de l’Amour divin manifesté en Jésus. D’esprit aussi, pour tirer de cette expérience des enseignements pour notre vie de tous les jours.
Si la Trinité divine, dans sa complexité à première vue, nous désarçonne quelque peu, nous pouvons faire appel au mystère de l’Incarnation. Il est au centre de la Révélation divine. Tous les autres mystères en découlent, y compris celui de la Résurrection de Jésus et de l’envoi de l’Esprit Saint.
Alors tout se tient : l’Amour s’est incarné pour nous, nous accompagne jusqu’à la fin des temps et nous intègre dans Sa propre circulation amoureuse pour faire de nous des oblations à notre tour.
Voici les quatre vérités fondamentales issues du mystère de la Trinité divine :
- Dieu est Amour;
- Jésus est le Fils de Dieu;
- Son Père qui est miséricorde et tendresse est aussi le nôtre;
- L’Esprit du Père et du Fils nous est promis à toutes et à tous, jusqu’à la fin des temps.
La première de ces vérités fondamentales – Dieu est Amour – se trouve à condenser en elle toutes les autres. À sa lumière, la Trinité devient la manifestation par excellence de la divinité.
Dieu ne peut s’isoler de notre humanité, justement parce qu’Il est déjà, en Lui-même, communication d’Amour, comme l’Évangéliste Jean aime nous le répéter. Et comme Dieu nous a aimé(e)s le premier, il nous demande en retour de nous aimer les uns les autres. Voilà résumés la loi et les prophètes.
Les premiers balbutiements
Dans Matthieu
L’Évangile de Matthieu se termine sur un envoi en mission qui enjoint de faire des disciples, “les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.”
Certains commentaires bibliques laissent entendre que cette précision serait un ajout influencé par l’usage liturgique établi plus tard dans la communauté primitive. Mais le même Matthieu (3,16) évoque clairement, lors du baptême de Jésus par Jean, une voix venue du ciel et qui proclamait Jésus Fils bien-aimé.
On peut donc facilement conclure que Matthieu lui-même, au moment où il écrivait son Évangile, était convaincu de la divinité de Jésus. Il en est de même des autres Évangélistes.
L’apôtre Paul
Mais le premier à avoir écrit sur la divinité de Jésus, c’est l’apôtre Paul qui, pourtant, n’avait pas connu le Jésus historique. Mais il avait écouté les témoignages de ceux qui avaient connu Jésus avant comme après la Croix.
Paul a écrit autour de l’an 60 de notre ère, donc quelques décennies après la mort de Jésus. Voici quelques extraits significatifs des convictions qui se développaient en Paul et qu’il tenait à transmettre aux différentes communautés qu’il avait fondées :
- « Car en lui habite corporellement toute la divinité; et vous vous trouvez en lui associés à sa plénitude, lui qui est la tête de toute principauté et de toute puissance. » (Col 2,9)
- « Lui de condition divine ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’anéantit lui-même, prenant condition d’esclave et devenant semblable aux hommes. » (Ph 2,6-7)
- « Aussi Dieu l’a-t-il exalté, lui donnant un nom au-dessus de tout nom, pour que tout, au nom de Jésus, s’agenouille, au plus haut des cieux, sur terre et dans les enfers. » (Ph 2,9-12)
- « En effet , si tes lèvres confessent que Jésus est Seigneur et si ton cœur croit que Dieu l’a ressuscité des morts, tu seras sauvé. » (Rm 10,9)
- « Nul ne peut dire : « Jésus est Seigneur, que sous l’action de l’Esprit Saint. » (1 Cor 12,3)
Évangile de Jean
Mais qu’en est-il de l’Esprit? La communauté primitive s’y référait constamment. Depuis la Pentecôte, ils étaient tous Un dans l’Esprit. Ils en vivaient quotidiennement, émerveillés de tout ce qu’Il produisait en eux.
Mais c’est l’Évangéliste Jean qui a le mieux défini la place de l’Esprit à l’intérieur de la Trinité divine :
- « L’Esprit Saint, le Paraclet que le Père enverra en mon nom vous enseignera tout. » (Jn 14,26)
- « L’Esprit de vérité me glorifiera, car c’est de mon bien qu’il prendra pour vous en faire part. Tout ce qu’a le Père est à moi. » (Jn 16,14-15)
- « Il leur dit encore une fois : Paix soit à vous! Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Cela dit, il souffla sur eux et leur dit : Recevez l’Esprit Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. » (Jn 20,21-23)
Ce qui ressort de ces textes de Jean…
- … la belle connivence entre Jésus et le Père;
- … le témoignage éclatant de la place du Fils et de l’Esprit au sein de la Trinité;
- … le lien étroit entre la réception de l’Esprit Saint et la capacité de remettre les péchés.
Il est facile de conclure que, dans la conviction de Jean, l’Esprit Saint est Dieu. « Mais alors, les trois sont Dieu? C’est débile! », s’objectait récemment un ami dont l’athéisme va grandissant depuis que, frôlant la mort, à l’instar de Gagarine qui avait frôlé le ciel, il n’avait pas vu trace de Dieu. Comment cela se peut-il que le Père, le Fils et l’Esprit soient tous trois Dieu? C’est une question dont la raison ne viendra jamais à bout.
Concile de Nicée
Pour le moment, contentons-nous de contempler une telle merveille… et faisons confiance à l’Esprit divin qui assistait les Pères du premier Concile de Nicée en 325. Départageant toutes sortes d’idées parfois saugrenues sur la nature de Jésus, le Concile conclut ceci :
« Nous croyons en un Dieu, Père tout puissant, créateur de toutes choses visibles et invisibles ; et en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, unique engendré du Père, c’est à dire de la substance du Père, Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré, non créé, consubstantiel (de même nature) au Père, par qui tout a été fait… »