Une attitude révolutionnaire

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Jésus à l’égard des femmes


26 octobre 2016


L’attitude de Jésus à l’endroit de la femme s’inscrit dans la même ligne que son attitude face aux laissés-pour-compte de la société de l’époque.

Compte tenu de la mentalité de l’époque, l’attitude de Jésus à l’égard des femmes fut exceptionelle, voire révolutionnaire… Afin d’apprécier l’originalité de son comportement, explorons dans un premier temps la condition de la femme dans le monde juif au temps de Jésus.

La situation sociale de la femme au temps de Jésus

Au temps de Jésus de Nazareth, la condition de la femme était loin d’être enviable. À titre d’exemples, mentionnons quelques textes des « enseignants du temps », les rabbins1 :

  • « Loué soit celui, qui ne m’a pas créé païen; loué soit celui qui ne m’a pas créé femme, loué soit celui qui ne m’a pas créé esclave »;
  • « Heureux celui dont les enfants sont mâles, mais malheur à celui dont les enfants sont femelles ».

Plusieurs dictons populaires étaient également très peu élogieux à l’égard des femmes :

  • « Là où il y a beaucoup de femmes, il y a beaucoup de sortilèges »;
  • « Dix ‘qabs’ de tête-vide ont fait leur apparition dans le monde, neuf ont été reçus par les femmes, et un par le reste du monde ».

Notons toutefois que ces dictons n’étaient pas propres au seul peuple juif, mais étaient plutôt le lot du monde oriental (environnant) en général.

Que dire maintenant de la place de la femme dans le monde civil en particulier?

La place de la femme dans la société civile

Dans le monde juif, la femme est pratiquement absente de la vie publique :

  • Femme en pleursElle se voile afin de passer inaperçue;
  • Un homme de bien ne doit pas adresser la parole à une femme dans la rue;
  • Les règles de bienséance interdisent de saluer une femme;
  • Un homme doit éviter de se retrouver seul avec une femme dans un lieu public.

Les « fiancailles » préparaient le passage de la jeune fille du pouvoir du père à celui du mari. Il s’agissait pratiquement de l’ « acquisition » de la fiancée par le fiancé.

On comparait même l’acquisition de la femme à celui de l’esclave : « on acquiert la femme par argent, contrat et rapports sexuels », de même « on acquiert l’esclave païen par argent, contrat et prise de possession ».

Une fois mariée, la femme devait obéir à son mari qui devenait son maître en toutes choses. Cette obéissance faisait partie de ses devoirs religieux. Son rôle se réduisait pratiquement à celui d’une servante.

Finalement, ce qui valorisait la femme aux yeux de son mari, c’était sa fécondité; particulièrement lorsqu’elle donnait naissance à des garçons.

Sur le plan juridique, le droit de divorcer ne valait que pour l’homme. Seul le mari pouvait répudier sa femme pour des motifs plus ou moins sérieux.

Quant à la polygamie, l’épouse se devait parfois de tolérer que son mari ait des concubines. Un rabbin posait la question suivante : « Quelle est la différence entre une épouse et une concubine? ». À cela il répondait : « L’épouse a un contrat de mariage, la concubine n’en a point ».

On le voit bien, la place de la femme dans la société civile était loin d’être enviable; l’était-elle plus dans le monde religieux?

La place de la femme dans le monde religieux

Au plan religieux, la situation de la femme était encore plus dégradée. Elle était sur le même pied que les enfants et les esclaves.

Les droits et les devoirs religieux de la femme étaient très limités :

  • GrillageElle n’est pas tenue d’étudier la loi (la Torah)2 : les écoles sont réservées aux garçons;
  • L’intérieur du Temple lui est interdit;
  • Dans les synagogues3, on lui assigne un emplacement spécial, derrière des barrières;
  • Dans le service liturgique, un seul rôle lui est confié : écouter;
  • À la maison, elle ne compte pas parmi les personnes invitées à prononcer la bénédiction après le repas.

Ainsi, autant dans le monde civil que religieux, la femme occupait un rôle de subordination et de sujétion. Tout le contraire donc du mouvement d’émancipation de la femme dans lequel se sont engagées les sociétés dites « modernes ».

Jésus faisait-il sien ce regard peu élogieux à l’égard de la femme? Les récits évangéliques nous révèlent une attitude fort différente…

L’attitude de Jésus à l’égard des femmes

Femme et lumière

Jésus s’est présenté comme le prophète du Royaume de Dieu4, dans lequel tous, hommes et femmes, sont appelés à participer à la liberté des enfants de Dieu, sans distinction de sexe ou de rang social.

Dans sa prédication, il a favorisé les petites gens, les opprimés, les délaissés et les pauvres.

Contrairement aux coutumes sociales de son temps, il a eu une attention spéciale pour les femmes, précisément parce que les tabous du temps les maintenaient dans une situation de sujétion, voire de mépris.

Voici quelques exemples de l’attitude révolutionnaire de Jésus à l’égard des femmes :

  • Dans ses paraboles, il évoque avec tendresse la vie quotidienne de la femme, avec ses anxiétés et ses joies (Mt 13,33).
  • Pour offrir à tous le trésor du Royaume, il ne craint pas d’enfreindre les traditions rigides du temps :
    • il parle en public avec la samaritaine, une étrangère de surcroît (Jn 4,7);
    • il enseigne publiquement à une femme (Lc 10,39);
    • il permet même à des femmes de le suivre et, de fait, elles lui seront fidèles jusqu’à sa mort sur la croix (Mc 15,40);
    • il ne se gêne pas pour parler en faveur des femmes (Mc 12,40-44; 14,6-9);
    • il leur porte secours dans leur détresse (Mc 1,29-31; 5,21-43).

Compte tenu de la mentalité de l’époque, l’attitude de Jésus était inacceptable pour les bien-pensants du temps, et de ce fait, l’exposait même à la mort. C’est dire les risques que Jésus a pris en posant des gestes libérateurs à l’égard des femmes.

La prise de position de Jésus face au mariage

Fait sans précédent, la prise de position de Jésus face au mariage constitue une reconnaissance de l’égalité entre la femme et l’homme :

  • il rejette la polygamie (Mc 10,7-8);
  • il interdit absolument le divorce (Lc 16,18).

Rappelons que ces deux institutions permises par la loi ne favorisaient que les hommes. En les rejetant, Jésus restaure l’égalité entre les époux au sein même du couple.

C’est dans la même optique que, d’une part, il dénonce les désirs adultères des hommes (Mt 5,28) et que, d’autre part, il sauve de la mort la femme adultère qu’un groupe d’hommes aussi coupables qu’elle sont prêts à lapider (Jn 8,1-11). Jésus s’oppose par le fait même à une coutume qui ne sévissait pratiquement que contre l’adultère de la femme.

Mur et fleurs

Jésus a vu les gens du regard même de Dieu, un regard d’amour qui se situe bien au-delà des préjugés socioculturels.

Son attitude vis-à-vis de la femme s’inscrit dans la même ligne que son attitude face aux opprimés, aux méprisés, aux pécheurs bannis de la société de l’époque.

Libérateur au nom même de Dieu en ce monde d’inégalités et d’injustices.

Vidéo

  1. Le terme hébreu (rabbi) signifie en français « mon maître ». Il s’agit d’une manière respectueuse de désigner les docteurs de la Loi, les spécialistes juifs de la Bible (cf. Xavier Léon-Dufour, Dictionnaire du Nouveau Testament, Seuil, 1975).
  2. À l’origine, ce mot désignait les cinq premiers livres de l’Ancien Testament (Le Pentateuque), par rapport aux « Prophètes ». Plus tard, dans le judaïsme, le terme désignera non seulement la Bible en son entier, mais aussi la loi orale, c’est-à-dire l’interprétation officielle de la loi écrite (cf. Xavier Léon-Dufour, Dictionnaire du Nouveau Testament, Seuil, 1975).
  3. C’est la la maison de prière des Juifs. Elle consiste en une salle où il n’y a pas d’autel; mais on y retrouve une armoire sacrée contenant les rouleaux de la Bible. Le préposé n’est pas un prêtre, mais un laïc, le « chef de la synagogue » choisi parmi les notables du village ou du quartier (cf. Xavier Léon-Dufour, Dictionnaire du Nouveau Testament, Seuil, 1975).
  4. Pour Jésus, le Royaume ou Règne de Dieu n’est pas proprement un lieu, mais plutôt une relation particulière entre Dieu et les humains, plus spécialement avec les pauvres. Le Royaume de Dieu est tout proche : telle est la Bonne Nouvelle proclamée par Jésus. Ce Royaume est même déjà à l’œuvre, d’une manière mystérieuse, comme une semence déposée par Dieu au cœur de l’être humain (cf. Xavier Léon-Dufour, Dictionnaire du Nouveau Testament, Seuil, 1975).
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