Du Dieu de l’Eden au Dieu à Gethsémani

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Du « Dieu hors du jeu » au « Dieu solidaire et victime »

N.B. Les textes bibliques de Genèse 3 et Matthieu 26,36-45 figurent en fin d’article.

Si nous admettons que c’est le Dieu de notre intimité qui est réellement la source unique de tout être qui n’est pas lui, nous devons ajouter aussitôt qu’il ne peut l’être que selon ce qu’il est, c’est-à-dire comme l’amour qui n’est qu’Amour. D’où il apparaît immédiatement en situation de réciprocité avec l’univers.

Cela nous deviendra aisément saisissable si nous comparons le chapitre 3 de la Genèse avec les récits synoptiques de l’agonie de Jésus.

Adam, Ève et serpent

Si nous relisons le chapitre 3 de la Genèse, qui est celui de la chute originelle, nous y rencontrons un Dieu juste, bien sûr, un Dieu innocent du mal auquel l’homme va succomber, mais c’est un Dieu maître, qui est hors du jeu, qui dispose de tout sans être engagé à rien, qui impose une épreuve dont l’échec sera sanctionné par de terribles châtiments et qui les inflige, en effet, une fois la faute commise, laquelle consiste essentiellement dans la méconnaissance de son autorité souveraine. Il est vrai qu’une porte reste ouverte sur une éventuelle rédemption annoncée en termes voilés.

Dans les récits synoptiques de l’Agonie, nous rencontrons, au contraire, un Dieu victime, abandonné, solitaire, qui quête l’amitié de ses disciples endormis.

Il y a une distance immense d’un récit à l’autre.

Jésus de Nazareth

Dieu n’est plus à Gethsémani le maître qui s’impose, qui nous livre à notre destin sans être aucunement solidaire de nous et qui pourrait tout aussi bien jouer la pièce tout seul : dans le jardin de l’Agonie, le mal n’apparaît plus comme la simple transgression d’un commandement, mais comme une blessure faite à quelqu’un, de même que réciproquement, le bien s’y révèle comme quelqu’un à aimer.

Je est un Autre, Maurice Zundel, Anne Sigier, 1997, p. 35-36.


N.B. Les textes bibliques sont tirés de https://www.aelf.org/

Chapitre 3 de Genèse

01 Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que le Seigneur Dieu avait faits. Il dit à la femme : « Alors, Dieu vous a vraiment dit : “Vous ne mangerez d’aucun arbre du jardin” ? »

02 La femme répondit au serpent : « Nous mangeons les fruits des arbres du jardin.

03 Mais, pour le fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : “Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez.” »

04 Le serpent dit à la femme : « Pas du tout ! Vous ne mourrez pas !

05 Mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. »

06 La femme s’aperçut que le fruit de l’arbre devait être savoureux, qu’il était agréable à regarder et qu’il était désirable, cet arbre, puisqu’il donnait l’intelligence. Elle prit de son fruit, et en mangea. Elle en donna aussi à son mari, et il en mangea.

07 Alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils se rendirent compte qu’ils étaient nus. Ils attachèrent les unes aux autres des feuilles de figuier, et ils s’en firent des pagnes.

08 Ils entendirent la voix du Seigneur Dieu qui se promenait dans le jardin à la brise du jour. L’homme et sa femme allèrent se cacher aux regards du Seigneur Dieu parmi les arbres du jardin.

09 Le Seigneur Dieu appela l’homme et lui dit : « Où es-tu donc ? »

10 Il répondit : « J’ai entendu ta voix dans le jardin, j’ai pris peur parce que je suis nu, et je me suis caché. »

11 Le Seigneur reprit : « Qui donc t’a dit que tu étais nu ? Aurais-tu mangé de l’arbre dont je t’avais interdit de manger ? »

12 L’homme répondit : « La femme que tu m’as donnée, c’est elle qui m’a donné du fruit de l’arbre, et j’en ai mangé. »

13 Le Seigneur Dieu dit à la femme : « Qu’as-tu fait là ? » La femme répondit : « Le serpent m’a trompée, et j’ai mangé. »

14 Alors le Seigneur Dieu dit au serpent : « Parce que tu as fait cela, tu seras maudit parmi tous les animaux et toutes les bêtes des champs. Tu ramperas sur le ventre et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie.

15 Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance : celle-ci te meurtrira la tête, et toi, tu lui meurtriras le talon. »

16 Le Seigneur Dieu dit ensuite à la femme : « Je multiplierai la peine de tes grossesses ; c’est dans la peine que tu enfanteras des fils. Ton désir te portera vers ton mari, et celui-ci dominera sur toi. »

17 Il dit enfin à l’homme : « Parce que tu as écouté la voix de ta femme, et que tu as mangé le fruit de l’arbre que je t’avais interdit de manger : maudit soit le sol à cause de toi ! C’est dans la peine que tu en tireras ta nourriture, tous les jours de ta vie.

18 De lui-même, il te donnera épines et chardons, mais tu auras ta nourriture en cultivant les champs.

19 C’est à la sueur de ton visage que tu gagneras ton pain, jusqu’à ce que tu retournes à la terre dont tu proviens ; car tu es poussière, et à la poussière tu retourneras. »

20 L’homme appela sa femme Ève (c’est-à-dire : la vivante), parce qu’elle fut la mère de tous les vivants.

21 Le Seigneur Dieu fit à l’homme et à sa femme des tuniques de peau et les en revêtit.

22 Puis le Seigneur Dieu déclara : « Voilà que l’homme est devenu comme l’un de nous par la connaissance du bien et du mal ! Maintenant, ne permettons pas qu’il avance la main, qu’il cueille aussi le fruit de l’arbre de vie, qu’il en mange et vive éternellement ! »

23 Alors le Seigneur Dieu le renvoya du jardin d’Éden, pour qu’il travaille la terre d’où il avait été tiré.

24 Il expulsa l’homme, et il posta, à l’orient du jardin d’Éden, les Kéroubim, armés d’un glaive fulgurant, pour garder l’accès de l’arbre de vie.

Évangile selon saint Matthieu chapitre 26, versets 36-45

36 Alors Jésus parvient avec eux à un domaine appelé Gethsémani et leur dit : « Asseyez-vous ici, pendant que je vais là-bas pour prier. »

37 Il emmena Pierre, ainsi que Jacques et Jean, les deux fils de Zébédée, et il commença à ressentir tristesse et angoisse.

38 Il leur dit alors : « Mon âme est triste à en mourir. Restez ici et veillez avec moi. »

39 Allant un peu plus loin, il tomba face contre terre en priant, et il disait : « Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi ! Cependant, non pas comme moi, je veux, mais comme toi, tu veux. »

40 Puis il revient vers ses disciples et les trouve endormis ; il dit à Pierre : « Ainsi, vous n’avez pas eu la force de veiller seulement une heure avec moi ?

41 Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation ; l’esprit est ardent, mais la chair est faible. »

42 De nouveau, il s’éloigna et pria, pour la deuxième fois ; il disait : « Mon Père, si cette coupe ne peut passer sans que je la boive, que ta volonté soit faite ! »

43 Revenu près des disciples, de nouveau il les trouva endormis, car leurs yeux étaient lourds de sommeil.

44 Les laissant, de nouveau il s’éloigna et pria pour la troisième fois, en répétant les mêmes paroles. 

45 Alors il revient vers les disciples et leur dit : « Désormais, vous pouvez dormir et vous reposer. Voici qu’elle est proche, l’heure où le Fils de l’homme est livré aux mains des pécheurs.


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