Au cœur de la vie chrétienne …

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La relation d’agapè et de fraternité


22 septembre 2017


La fraternité constitue une réalité centrale du message évangélique que tout chrétien est appelé à privilégier à l’instar de la communauté primitive.

Introduction

Mains croiséesLa fraternité est au coeur même de la communauté chrétienne. En effet, l’une des grandes lignes de fond qui traverse les textes néo­testamentaires, c’est bien le concept de fraternité chrétienne.

La relation de fraternité fut, avec l’urgence de la mission, la valeur fondamentale qu’a privilégiée la première communauté chrétienne.

La relation d’agapè (amour-charité) et de fraternité est apparue aux premiers chrétiens comme le centre et le noyau de l’existence dans le Christ.

Cette priorité donnée à la fraternité n’est pas une création de l’Église primitive; elle remonte à Jésus lui-même et elle constitue un élément de base du projet évangélique qu’il a proposé à ses disciples. Contentons-nous d’évoquer brièvement ces réalités.

Au centre de la vie et de la prédication de Jésus

L’annonce du Règne de Dieu

Jésus annonce le règne
Auteur : Bernadette Lopez
evangile-et-peinture.org

Il est universellement reconnu aujourd’hui que le centre de la prédication de Jésus de Nazareth a consisté essentiellement dans l’annonce du Règne de Dieu.

Jésus n’est pas venu prêcher une nouvelle religion, ou enseigner une nouvelle idéologie ou encore une nouvelle philosophie de vie : il est venu annoncer la venue imminente du Règne de Dieu.

Qu’est-ce à dire? Tout simplement que Dieu était à la veille d’intervenir de façon décisive pour instaurer son Règne parmi les hommes.

Ce rêve de Dieu pour l’humanité comportait deux dimensions fondamentales « inter-reliées » :

Dieu allait révéler en Jésus le mystère de son amour de Père et offrir à tous le don de sa filiation adoptive et, par la même occasion, il allait proposer à l’ensemble de l’humanité un grand projet de fraternité et de communion entre les personnes, comme fils et filles d’un même Père.

C’est globalement ce projet de salut que Jésus est venu annoncer au monde. Il ne s’est pas contenté de l’annoncer, il l’a inauguré.

Jésus, homme de l’accueil sans condition

Jésus et disciplesJésus a instauré un style de fraternité qui allait à l’encontre des coutumes de son temps. Il a été l’homme de l’accueil sans condition dans une fraternité ouverte à tous.

Il a accueilli toute une catégorie de gens que les pharisiens et les chefs religieux du temps repoussaient et excluaient au nom même de la sainteté : il ne fallait pas souiller sa sainteté au contact des pécheurs, des miséreux, des infirmes.

Jésus, au contraire, s’est situé ouvertement du côté des petits, des faibles, des pauvres : « L’Esprit du Seigneur… m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres » (Lc 4,18). Il a fréquenté les publicains et les pécheurs (cf. Lc 19,71 et Mt 9,10-132). Il a montré une tendresse spéciale à l’égard des paralytiques et des lépreux, ces gens tarés que la société d’alors négligeait ou repoussait.

Son sens de la fraternité et de l’agapè (amour-charité) était bien au-dessus de ces conventions sociales et religieuses discriminatoires. Il a préconisé une fraternité ouverte et universelle qui allait même jusqu’à l’amour des ennemis Lc 6,27-283).

Une vie concrète de fraternité avec ses disciples

Par ailleurs, Jésus a appelé à sa suite un petit groupe choisi de disciples avec lesquels il a mené une vie concrète de fraternité dans un partage complet.

Dans le groupe de ses disciples, il y a d’abord les Douze qui ont reçu une invitation toute spéciale à le suivre : « Ils vinrent à lui et il en établit douze pour être avec lui et pour les envoyer prêcher » (Mc 3,14). Il y a, en plus, d’autres hommes et femmes qui, sans appartenir à la catégorie des Douze, s’en rapprochent beaucoup et qui, comme disciples, partagent la vie du groupe (cf. Lc 8,1-34).

Avec tous ceux-là, Jésus a formé une communauté relativement stable. Leur situation est différente du cas de ceux qui le suivent de façon sporadique (cf. Mc 6,31s5).

Quelques traits de la fraternité autour de Jésus

L’annonce du Règne de Dieu

Notons quelques traits de cette communauté de Jésus :

  • Jésus serviteurJésus est indéniablement le centre du groupe et y exerce une fascination extraordinaire. Par ailleurs, l’enseignement qu’il donne au sein du groupe n’est pas centré sur lui mais sur Dieu en tant que Père.
  • La fraternité dans le groupe n’a pas dû être facile, compte tenu du caractère bigarré de ses membres (anciens pêcheurs, publicains, zélotes, etc.).
  • Pour Jésus, ils sont tous égaux, frères et soeurs, fils et filles d’un même Père (cf. Mt 23,86).
  • Il ne doit pas y avoir entre eux des relations de domination ou de pouvoir, ni de tendances aux honneurs et au prestige personnel : au contraire, ils doivent se mettre au service les uns des autres, dans la simplicité et la générosité, à l’exemple du Maître.
  • Loin de former un ghetto autour de Jésus, ce groupe d’apôtres et de disciples est une communauté ouverte aux autres. Ensemble, ils vont avec Jésus de villages en villages, là où vivent et peinent les petites gens.
  • Ils vivent à la suite de Jésus dans « l’itinérance », le dépouillement et le partage.
  • Ils constituent un groupe de témoignage au service de l’annonce du Règne de Dieu. De temps en temps, Jésus les envoie seuls en mission, particulièrement les Douze (cf. Mt 10,5-157); ils ont comme mandat d’annoncer la venue imminente du Règne et de le rendre visible par certains signes (cf. Mt 10,7-88), prolongeant en cela la prédication et l’agir du Maître.

Malgré cette expérience prolongée de communauté avec Jésus et de la forte cohésion atteinte par le groupe, tout s’écroulera à la mort du Maître. Ce dernier ira à la mort pratiquement seul et le groupe se dispersera (cf. Mc 14,279 et 14,5010).

Quelques jours plus tard toutefois, l’événement de la résurrection de Jésus marquera le retour en force du groupe : ensemble ils témoigneront de la joie de la résurrection.

Au centre des communautés chrétiennes primitives

Jésus ressuscité et apôtresLa Présence du Ressuscité

La communauté de Jésus sera cimentée par les apparitions pascales du Ressuscité et par une conviction commune que le Crucifié est bien vivant et présent au milieu d’eux. Bien plus, c’est lui-même qui les rassemble et les envoie en mission (cf. Mt 28,16-2011).

Comme un projet d’amour…

L’oeuvre de Jésus renaît avec une vigueur insoupçonnée. Le premier groupe chrétien semble bien avoir perçu l’amour fraternel comme un mandat que lui a légué Jésus dans une sorte de testament spirituel :

« Je vous donne un commandement nouveau (c’est-à-dire un mandat ou une mission) : Aimez-vous les uns les autres. Oui, comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres » (Jn 13,34).

Les premiers chrétiens ont conçu le christianisme comme le projet sauveur de Dieu, mais aussi comme un projet d’amour, de fraternité, de communion comme fils et filles du même Père et frères et soeurs de Jésus Christ. Les textes du Nouveau Testament nous témoignent de ce fait de multiples façons.

La vie de la communauté primitive

Fraternité
Auteur : Bernadette Lopez
evangile-et-peinture.org

Luc, dans le livre des Actes des Apôtres, s’emploiera à nous présenter quelques descriptions synthétiques de la vie du premier groupe chrétien : « Ils étaient assidus à l’enseignement des apôtres et à la communion fraternelle (koinonia), à la fraction du pain (l’Eucharistie) et aux prières » (Ac 2,42).

« La multitude des croyants n’avait qu’un coeur et qu’une âme… entre eux, tout était en commun » (Ac 4,32).

Sans doute Luc donne-t-il dans ces résumés un tableau idéal de la communauté primitive. Il y eut des moments difficiles (cf. Ac 6,112).

Il n’en reste pas moins qu’il en ressort une conception très éclairante de la vie chrétienne en ses débuts ainsi que des valeurs qu’on a privilégiées.

Rassemblés par le Christ

La première communauté apostolique fut une communauté de foi, de prière, de communion fraternelle, de partage des biens, dans une atmosphère d’entraide et de préoccupation pour les pauvres.

Croix glorieuseLes croyant-e-s se sentaient unis entre eux par le Christ ressuscité présent au milieu du groupe.

Ils avaient conscience d’être rassemblés par le Christ dans une fraternité profonde. La table commune et l’Eucharistie constituaient le lieu par excellence du mémorial du Seigneur et du partage de la Parole.

C’est dans ces réunions qu’on se remémorait ensemble les paroles et les actions de Jésus. Nos évangiles actuels ont probablement vu le jour dans le cadre de ces communautés fraternelles de croyant-e-s.

L’idéal de la fraternité

L’abondance du vocabulaire de fraternité dans le Nouveau Testament est aussi très révélateur : dans l’Église primitive, on s’appelait couramment du titre de « frère » et de « soeur ». On trouve ces termes plus de 130 fois dans les épîtres pauliniennes. Pour saint Paul, Jésus Christ ressuscité est « l’aîné d’une multitude de frères ». Selon l’Apôtre, les croyant-e-s sont « un seul corps en Christ, étant tous membres les uns des autres, chacun pour sa part » (Rm 12,5).

Église - CommunionDans cette perspective, on comprend qu’ils nourrissaient un fort sentiment d’appartenance à la communauté. Pour eux, les liens qui les unissaient étaient encore plus forts que les liens du sang. Jésus lui-même n’avait-il pas dit : « Qui sont ma mère et mes frères? (…) Quiconque fait la volonté de Dieu, voilà mon frère, ma soeur, ma mère » (Mc 3,33-35).

De ces témoignages, et de bien d’autres encore, il ressort nettement que la fraternité constitue une réalité centrale du message évangélique que tout chrétien est appelé à privilégier à l’instar de la communauté primitive. En christianisme, les croyants et les croyantes ont comme idéal de vivre la fraternité en tant que frères et soeurs de Jésus Christ et fils et filles d’un même Père.

En conclusion

Don de l'EspritSi elle est communion fraternelle dans la foi, la vie communautaire en Église peut apporter au monde un témoignage prophétique de fraternité et incarner l’espérance d’une réconciliation possible en Jésus Christ, malgré les forces de division et de rupture à l’oeuvre dans notre monde.

Plus que jamais, nous avons pris conscience du drame de la violence, de l’intolérance, du racisme, de l’exploitation, de l’exclusion, de la déchirure, de la haine… Dans ce contexte, le témoignage de la fraternité, dans la communion et le partage, avec « un seul coeur et une seule âme », prend tout son relief.

Est-ce trop nous demander que de nous convier à être dans le monde des témoins de communion fraternelle et des artisans d’unité et de réconciliation? Tâche impossible, sans doute, si nous sommes laissés à nous-mêmes, mais possible avec la grâce de Dieu : la fraternité évangélique n’est pas, d’abord, un idéal humain; elle est une réalité donnée par Dieu à recevoir avec gratitude.

  1. Lc 19,7
    19:7 Voyant cela, tous murmuraient; ils disaient: “C’est chez un pécheur qu’il est allé loger.”
    TOB

  2. Mt 9,10-13
    9:10 Or, comme il était à table dans sa maison, il arriva que beaucoup de collecteurs d’impôts et de pécheurs étaient venus prendre place avec Jésus et ses disciples.
    9:11 Voyant cela, les Pharisiens disaient à ses disciples: “Pourquoi votre maître mange-t-il avec les collecteurs d’impôts et les pécheurs?”
    9:12 Mais Jésus, qui avait entendu, déclara: “Ce ne sont pas les bien-portants qui ont besoin de médecin, mais les malades.
    9:13 Allez donc apprendre ce que signifie: C’est la miséricorde que je veux, non le sacrifice. Car je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs.”
    TOB

  3. Lc 6,27-28
    6:27 “Mais je vous dis, à vous qui m’écoutez: Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent,
    6:28 bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient.
    TOB

  4. Lc 8,1-3
    8:1 Or, par la suite, Jésus faisait route à travers villes et villages; il proclamait et annonçait la bonne nouvelle du Règne de Dieu. Les Douze étaient avec lui,
    8:2 et aussi des femmes qui avaient été guéries d’esprits mauvais et de maladies: Marie, dite de Magdala, dont étaient sortis sept démons,
    8:3 Jeanne, femme de Chouza, intendant d’Hérode, Suzanne et beaucoup d’autres qui les aidaient de leurs biens.
    TOB

  5. Mc 6,31s
    6:31 Il leur dit: “Vous autres, venez à l’écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu.” Car il y avait beaucoup de monde qui venait et repartait, et eux n’avaient pas même le temps de manger.
    6:32 Ils partirent en barque vers un lieu désert, à l’écart.
    6:33 Les gens les virent s’éloigner et beaucoup les reconnurent. Alors, à pied, de toutes les villes, ils coururent à cet endroit et arrivèrent avant eux.
    6:34 En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut pris de pitié pour eux parce qu’ils étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger, et il se mit à leur enseigner beaucoup de choses.
    TOB

  6. Mt 23,8
    23:8 Pour vous, ne vous faites pas appeler Maître, car vous n’avez qu’un seul Maître et vous êtes tous frères.
    TOB

  7. Mt 10,5-15
    10:5 Ces douze, Jésus les envoya en mission avec les instructions suivantes: “Ne prenez pas le chemin des païens et n’entrez pas dans une ville de Samaritains;
    10:6 allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël.
    10:7 En chemin, proclamez que le Règne des cieux s’est approché.
    10:8 Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, chassez les démons. Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement.
    10:9 “Ne vous procurez ni or, ni argent, ni monnaie à mettre dans vos ceintures,
    10:10 ni sac pour la route, ni deux tuniques, ni sandales ni bâton, car l’ouvrier a droit à sa nourriture.
    10:11 Dans quelque ville ou village que vous entriez, informez-vous pour savoir qui est digne de vous recevoir et demeurez là jusqu’à votre départ.
    10:12 En entrant dans la maison, saluez-la;
    10:13 si cette maison en est digne, que votre paix vienne sur elle; mais si elle n’en est pas digne, que votre paix revienne à vous.
    10:14 Si l’on ne vous accueille pas et si l’on n’écoute pas vos paroles, en quittant cette maison ou cette ville, secouez la poussière de vos pieds.
    10:15 En vérité, je vous le déclare: au jour du jugement, le pays de Sodome et de Gomorrhe sera traité avec moins de rigueur que cette ville.
    TOB

  8. Mt 10,7-8
    10:7 En chemin, proclamez que le Règne des cieux s’est approché.
    10:8 Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, chassez les démons. Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement.
    TOB

  9. Mc 14,27
    14:27 Et Jésus leur dit: “Tous, vous allez tomber, car il est écrit: Je frapperai le berger, et les brebis seront dispersées.
    TOB

  10. Mc 14,50
    14:50 Et tous l’abandonnèrent et prirent la fuite.
    TOB

  11. Mt 28,16-20
    28:16 Quant aux onze disciples, ils se rendirent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre.
    28:17 Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais quelques-uns eurent des doutes.
    28:18 Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles: “Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre.
    28:19 Allez donc: de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit,
    28:20 leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps.”
    TOB

  12. Ac 6,1
    6:1 En ces jours-là, le nombre des disciples augmentait, et les Hellénistes se mirent à récriminer contre les Hébreux parce que leurs veuves étaient oubliées dans le service quotidien.
    TOB

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