Quand l’Église se retrouve à l’église – IV

Quatrième d’une série de cinq, cette capsule parle de l’autel, de l’ambon et du siège présidentiel. Si chacun de ces meubles a une fonction propre, ils ont aussi une portée symbolique qui donne déjà de mieux comprendre l’eucharistie dans son rapport avec le mystère et avec l’assemblée à qui elle est destinée.

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Texte

Ceux qui fréquentaient l’église en 1965, ceux qui allaient à la messe pour employer l’expression familière, se souviennent sans doute du choc des changements liturgiques demandés par le Concile.

Un vent de nouveauté se met à souffler. L’antique latin cède la place au français et les autels « virent de bord » ou plutôt se détachent des retables ou du mur pour entreprendre à rebours la migration qui les y avait conduits au lointain Moyen-âge. Parce qu’ils n’avaient pas toujours été là. Ils avaient déjà été au cœur de l’assemblée. En 1965 s’opère littéralement comme un retour aux origines. Le prêtre ne dit plus « sa » messe seul, face au mur, mais désormais il célèbre avec elle. L’autel est redevenu une table.

On a aussi installé un siège pour la personne qui préside, car en fait le prêtre ne célèbre pas il préside l’assemblée qui elle, célèbre. Il ne faut jamais perdre de vue qu’il célèbre avec elle. On a aussi installé un pupitre pour les lectures, car des extraits de la Parole de Dieu sont proclamés et doivent être entendus.

Mais ces meubles n’ont pas qu’un aspect pratique, ils ont une portée symbolique majeure. Il faut se rappeler qu’à l’eucharistie, le Christ se donne d’être présent sous trois formes. Certes, sa présence réelle ou si vous préférez sa réelle présence nous est donnée sous la forme du pain et du vin consacrés devenus corps et sang du Christ.

Mais elle n’est pas la seule, l’assemblée est aussi un signe efficace de sa présence. L’assemblée donne un visage concret et bien réel à cette Église qui est Corps du Christ. Il y a dans l’assemblée une réelle présence du Christ. À sa manière l’assemblée en est le sacrement et il en est de même pour la Parole proclamée.

Or l’accueil et la reconnaissance de ces trois présences donnent à nos lieux de culte leur forme particulière et commandent un mobilier directement ordonné à leur mise en valeur. Dans une église ou une chapelle bien aménagée et qui ne souffre pas du trop fréquent encombrement des sanctuaires, trois lieux sont donc repérables.

Un premier, certes le plus noble, est le lieu du mémorial proprement dit. Il occupe la place d’honneur. C’est là que l’on trouve la table eucharistique. C’est d’abord et avant tout une table puisque là se célèbre le repas du Seigneur, comme l’appelle si justement Saint Paul, là où se pratique la fraction du pain.

Mais c’est aussi le lieu de l’offrande, d’où ce nom d’autel, le lieu où s’opère le passage entre l’humain et le divin. L’autel est par excellence le signe du don du Christ.  Puisqu’elle évoque sa présence, la table eucharistique est entourée d’un grand respect. On s’incline devant elle et le président la baise à l’arrivée et au départ.

Un deuxième lieu est celui de la proclamation de la Parole dont le meuble caractéristique est l’ambon. L’origine de son nom est obscure. On croit généralement qu’il vient d’un verbe grec « alambano » qui veut dire monter, au sens de s’élever pour être vu et entendu. Il dit déjà toute l’importance de la fonction du lecteur ou de la lectrice, car ils donnent de rendre vie aux textes sacrés.

Comme le rappelle si bien la constitution conciliaire Dei Verbum, quand la Parole est proclamée c’est le Christ lui-même qui parle, si bien que, qu’il soit laïc, diacre, prêtre ou même évêque, tous se mettent à son écoute. La Parole y est commentée sous la forme d’un entretien familier appelé homélie, un autre mot venu du grec, le mot « homelia » qui veut dire tout simplement « conversation ». L’homélie est une conversation…

L’ambon a lui aussi quelque chose de sacré, mais il ne faut pas le confondre avec la chaire. Cette dernière n’est plus en usage. Elle est apparue dans les églises après le concile de Trente quand on exigea que le catéchisme y fût enseigné tous les dimanches. Ce meuble rappelle ceux qu’on trouvait autrefois dans les universités, d’où son nom.

Enfin dans un espace cultuel d’ailleurs essentiellement destiné à accueillir une assemblée en prière, un lieu plus spécifique marque cette fonction, c’est celui de la présidence.

Il ne s’agit pas d’un trône, mais bien d’un siège, le siège présidentiel. Il signifie qu’une assemblée est convoquée et rassemblée par quelqu’un. Certes c’est le Christ qui convoque et rassemble, mais la personne qui préside au rassemblement est là pour le signifier.

Comprenant bien tout cela, il me semble que l’on retrouve ici un peu de cette proximité des origines surtout quand on se redit qu’ici l’assemblée est première et que sa participation est nécessaire.

Par ailleurs, il n’y a pas que ces trois meubles, l’espace liturgique lui-même est au service de l’assemblée. Si l’histoire la bien souvent orienté les regards dans une autre direction, il peut en être bien autrement. Nous en parlons dans une autre capsule intitulée : L’espace liturgique.